top of page
  • bsoccol

Boris Vian met des mots sur nos peurs et sur nos envies de vivre


Françoise Canetti dirige le label Jacques Canetti, les Editions Majestic et la direction du théâtre des Trois Baudets.

Nous fêtons en 2020 le Centième anniversaire de la naissance de Boris Vian. Quelles initiatives avez-vous prises pour mieux faire connaître cet immense auteur ?

En 2020, on célèbre partout Boris Vian. Son oeuvre – loin d’avoir vieilli – me semble prémonitoire, surtout à travers ses chansons ! Il en a écrit plus de 400 dont « Le Deserteur » ou « Je suis Snob « que l’on fait systématiquement écouter lorsque l’on parle de lui. Parce que je suis la fille de Jacques Canetti, son producteur musical, je prolonge le formidable travail d’éditeur de mon père. C’est lui qui a proposé les chansons alors inconnues de Boris à des interprètes tels que Serge Reggiani, Jacques Higelin, Magali Noel, Mouloudji et tant d’autres. Dans le coffret « Boris Vian 100 ans-100 chansons * qui vient de paraître, j’ai rassemblé des interprètes d’hier et d’aujourd’hui, des chansons très connues, mais aussi des chansons introuvables (de vraies pépites) et des chansons inédites enregistrées en 2019. C’est un hommage à Boris Vian, car j’ai été élevée dans ses chansons, dans ses mots. C’est aussi un hommage au travail de mon père, ce découvreur hors pair.

  • Productions Jacques Canetti-En exclusivité à la Fnac ou Fnac.com

Votre père Jacques Canetti a été entre autres le producteur musical de Boris Vian, comment s’est passé leur rencontre ? Ils se sont rencontrés en 1953 dans un ascenseur de la Salle Pleyel. En 5 étages … ils se sont « trouvés » et ne se sont plus quittés jusqu’à 1959. En 1954, mon père a monté dans son théâtre Les Trois Baudets, « Ciné-Massacre » une pièce hilarante de Boris Vian. En 1955, il lui a conseillé de chanter ses propres chansons sur la scène des Baudets, puis en tournée où il était pris à parti avec « Le déserteur » qu’il osait chanter en pleine guerre d’Algérie. Fin 1956, mon père a proposé à Boris de devenir son adjoint chez Philips dont mon père dirigeait la production artistique.

Boris Vian dans une de ses chansons « La complainte du progrès » dénonçait déjà la surconsommation ; n’était-il pas écologiste avant l’heure ? Boris la chantait sur scène en 1954. La France se reconstruisait et avait besoin de tout. Sur un rythme de chachacha, avec des mots souvent nouveaux et très drôles, cette chanson ainsi que « Le petit commerce » ont été lancées au Salon des Arts ménagers en 1955 ; deux chansons anticonsuméristes avant l’heure. La plupart des chansons de Boris offrent une vraie vision du monde. Dans notre coffret, il y a une « pépite » vraiment écologique : « Ils cassent le monde en petits morceaux’’ de Jean Louis Aubert. Il a mis en musique et chanté ce texte de Boris Vian qui date de 1957. On ne connaissait pas encore le gaz de schiste !

La jeune génération connaît-elle Boris Vian auteur de chansons ?

Elle est en train de les découvrir, notamment grâce au groupe «Debout sur le zinc» qui a enregistré un album vinyle + CD et qui sillonnait jusqu’à la semaine dernière la France avec « Vian par Debout sur le Zinc ». Un spectacle qui affichait complet partout ! Malheureusement tout s’est arrêté, France 5 a eu la bonne idée de filmer et de diffuser leur spectacle. Bravo à Michel Field.

Aujourd’hui la gêne respiratoire est une des caractéristiques du Covid 19. Boris Vian a été pendant des années victime de ce mal. Pouvez-vous nous en dire plus ? Boris Vian était malade du cœur depuis ses 16 ans. Il avait confié à mon père en 1954 qu’il savait qu’il mourait avant l’âge de 40 ans. Boris était donc un homme pressé, très organisé, qui jonglait avec beaucoup de choses à la fois. La plupart de ses chansons sont des « hymnes à la vie ». Il dénonce l’horreur de la guerre où l’on meurt industriellement. Il respecte trop la vie pour la voir gâchée.

Il dénonce le conformisme sous toutes ses formes. C’est un individualiste, un indépendant qui nous oblige à nous forger notre propre opinion. Il ne se laisse enrôler dans aucun parti.

En ces temps de confinement, quelle chanson pourriez-vous nous conseiller ?

J’en conseillerais deux si vous le permettez.

Je voudras pas crever, poème de Boris Vian mis en musique par Debout sur le Zinc. Chanson oh combien actuelle. En cette période de pandémie où beaucoup sont affolés par les conséquences de cette infection, Boris Vian met des mots sur nos peurs et sur nos envies de vivre…

Enfin, Donne, Donne, une chanson introuvable, un “gospel à la française” interprété par Henri Salvador et le Golden Gate Quartet d’une générosité rafraichissante “Puisque tu as tout reçu, donne ce que tu as reçu à ceux qui n’ont rien.”

C’est exactement ce à quoi nous assistons avec cet élan de générosité qui fleurit partout en France.

1 vue0 commentaire
bottom of page