Interview de Sébastien Lecornu, Ministre auprès de la ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales.
1) Comment organisez-vous concrètement le travail et la continuité de votre cabinet depuis le début de la crise?
Depuis la mise en place des mesures de confinement, nous avons adapté le fonctionnement du cabinet pour éviter les réunions physiques. La plupart des rendez-vous ont été basculés en conférences téléphoniques ou en visioconférences. Y compris le Conseil des ministres auquel j’assiste à distance depuis le ministère. Je passe beaucoup plus de temps au téléphone avec mes collaborateurs afin de suivre les dossiers en cours.
2) Les maires sont très souvent sollicités, en première ligne dans la mise en oeuvre des politiques publiques. La « Loi engagement et proximité » que vous avez faite voter en juillet dernier y trouve-t-elle une justification supplémentaire?
La loi “Engagement et Proximité” avait pour objectif de remettre le maire et la commune au coeur de la démocratie locale. La crise actuelle reflète justement bien à quel point nous avons besoin des élus locaux pour faire face à des défis de taille, en l’occurrence ici sanitaire. Le maire est agent de l’Etat, et à ce titre, doit aider à faire respecter les mesures de confinement décidées par le Gouvernement. Il détient des pouvoirs de police, que nous avons d’ailleurs renforcés dans la loi Engagement et Proximité ; et, depuis le vote de la loi d’urgence, la police municipale peut désormais verbaliser les mauvais comportements qui méprisent les règles de confinement. Le maire doit aussi assurer un minimum de services publics essentiels à la vie des Français (gestion de l’eau et des déchets, état-civil, protection des personnes fragiles, etc.). Enfin, nous accompagnons les maires dans le fonctionnement de leurs assemblées démocratiques, alors qu’elles ne peuvent plus se réunir normalement.
3) Cette crise sanitaire et son développement progressif, territoire par territoire, nécessite-t-elle de repenser et/ou d’accentuer la décentralisation?
Je ne suis pas sûr qu’il faille poser la question en ces termes. D’ailleurs, en situation de crise, le réflexe français est de se tourner spontanément et avant tout vers l’Etat. Nous avons la chance d’avoir un système de santé efficace et résilient. En revanche, nous avons évidemment besoin des collectivités territoriales pour lutter contre l’épidémie et surtout réfléchir au rebond économique qui doit suivre. Je vois donc cette crise comme une opportunité de bien montrer la complémentarité entre la puissance publique nationale incarnée par l’Etat et la puissance publique locale , unis au service de la protection des Français.
4) Sur cette question de la décentralisation, avez-vous des échanges de bonnes pratiques avec vos homologues européens (Allemand, Italiens, Espagnol…) ?
Nous regardons évidemment ce qui se passe chez nos voisins européens. Mais, il ne faut pas oublier la spécificité du modèle français, son histoire et l’aspiration de nos concitoyens qui veulent plus de libertés locales mais aussi une égalité républicaine territoriale. Depuis la Révolution française, et la transformation des paroisses en 36 000 communes (35 000 aujourd’hui), nous sommes attachés à cet échelon de la République. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas continuer à travailler à la poursuite de la décentralisation, au contraire, mais il faut le faire en prenant en compte ce qui fait notre identité et notre patrimoine commun.
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